Sainte-Hélène

Ste Hélène, mythique bout de rocher de l’Atlantique sud, escale incontournable des navires autour du monde depuis 400 ans… C’est la couronne britannique qui a mis la main sur le stratégique ilot, dont elle a sous-traité l’exploitation pendant près de 200 ans à la   «  East India Company » , chargée de veiller au ravitaillement des navires chargés d’épices, de retour des Indes… Depuis l’ouverture du canal de Suez en 1869, l’île n’est plus aussi stratégique pour l’Empire Britannique : l’activité va doucement décliner.

Mais l’île est surtout connue pour y avoir accueilli l’un des plus célèbres prisonniers du monde, Napoléon Bonaparte, empereur envoyé en exil par la coalition royaliste européenne pour y vivre les 7 dernières années de sa vie, et y mourrir.
Choisir pour l’exil du dangereux conquérant un lieu plus lointain, plus isolé, et plus austère aurait été difficile…..
Nous sommes donc très impatients de faire connaissance avec Ste-Hélène et ses 4000 habitants, un métissage de descendants d’esclaves, de soldats britanniques, de travailleurs chinois, indiens et de prisonniers boers, donnant aux visages la belle couleur café de la chanson de Gainsbourg.
L’île nous apparait sous les nuages, triste et sombre,

ses falaises de roche volcanique nous semblent une forteresse imprenable.
Des dauphins nous accompagnent, c’est toujours un grand bonheur de les voir nager entre les coques.
Quelques encablures avant d’arriver à Jamestown, nous appercevons les premières fortifications, bien intégrées dans la falaise.

Puis des bâtiments, comme un petit hameau accroché à la falaise.
Il s’agit en fait du premier poste de télécommunications, anciennement télégraphique, qui reliait l’île au continent africain. Les bâtiments ont été désertés bien sûr, mais c’est toujours de là que partent et arrivent les cables sous-marins qui relient le caillou au reste du monde, par téléphone, et par internet.
Dans la première baie, le port commercial, sa passerelle pour débarquer les passagers des paquebots, les entrepôts,

Puis enfin, Jamestown, qui sous ce ciel plombé nous apparait un peu lugubre. Il ne s’agit en fait que du quartier de « Half Tree Hollow », perché au-dessus de la ville, que surplombe le fort High Knoll, et dont toutes les maisons jouissent d’une belle vue mer.

AUSTERE, c’est le premier sentiment qui transparait.
 
Nous descendons à terre pour les formalités, longeons les bâtiments du port : sous de sinistres falaises grillagées,

beaucoup de bâtiments anciens, toujours en usage, mais modernisés, comme cette porte en bois dotée d’un loquet ancestral… et d’un digcode!! Voilà tout le paradoxe de Ste-Hélène : tradition, vestiges historiques, et modernité à la fois. Nous passons au bureau du port, puis aux douanes, enfin au poste de police pour l’immigration : nous sommes bien en territoire britannique, la photo de la Reine est dans tous les bureaux officiels! L’occasion de parler aux enfants de nos monarchies européennes encore en place et de disserter sur les différentes nuances entre monarchie, république, démocratie etc….Prélude à la riche histoire de l’île.
 
Nous passons sous le porche, longeons la piscine (dommage, elle est fermée pour travaux), traversons les jardins du chateau, fort bien entretenus. 
C’est dimanche, les rues de Jameston sont désertes, et l’ambience un peu triste-il faut dire que nous passons par hasard devant le centre de réhabilitation de la prison….
Nous allons donc prendre un peu de hauteur et nous attaquer aux 699 marches de la Jacob’s Ladder.
L’ancien plan incliné desservait la garnison militaire de Ladder Hill  située sur les hauteurs de la ville. Après un incendie, le plan incliné est devenu escalier. 
Tous les ans, les habitants les plus sportifs s’affrontent pour battre le record de la montée des marches : pour le Jacob’s Ladder Challenge, le record est de moins de 7mn!
Nous mettrons 15mn sans nous presser…
Vue d’en haut, nous apercevons le port, le village est impressionnant, blotti au fond de la vallée, tel un village de montagne. 

Jamestown est parait-il l’un des plus beaux exemples d’architecture géorgienne. Le bois est rare, car les chèvres importées sur l’île par la East India Company pour fournir les navires en viande fraiche au 17ème, ont décimé arbres et arbustes indigènes. Les maisons sont anciennes, en pierre, solides, et entretenues de génération en génération.

Wellington House

Nous prolongeons la balade vers le fort de Ladder Hill. L’essentiel des bâtiments est abandonné, mais tous ne tombent pas en ruines, et c’est aussi là qu’est installée la caserne des pompiers!
Certains des baraquement ont aussi l’air d’être habitées.
Un peu plus loin, des ruines, un cours de tennis abandonné, et des canons. La zone est en cours de réhabilitation pour en faire des équipements touristiques.
Et de l’autre côté de la vallée, un champ de panneaux solaires. L’électricité est encore très chère sur l’île.
Un peu plus haut, sur la colline, le quartier de « Half Tree Hollow », et en contrebas, les 22 corps-morts dédiés aux bateaux de plaisance repassage. 
Un peu plus loin, le port et le mouillage réservé aux bateaux locaux
Après cette petite marche vivifiante, nous redescendons les marches et prenons le temps de repérer les bâtiments de la ville :
de gauche à droite : le port, puis les douves du chateau, dans lesquelles ont été aménagées la piscine , un stand de tir à l’arc, et des terrains de jeu pour les jeunes, puis le chateau, son chemin de ronde, et son jardin, et en contrebas, l’église, la prison, la police, le musée.
Au centre, la rue principale, qui coupe la vallée en deux, longée de bâtiments géorgiens. Se détachent en particulier, au-dessus de l’église,  l’hotel Mantis, premier 4**** de l’île, qui vient d’ouvrir, et la maison Wellington, seule bâtisse brune et carrée, parms toutes ces maisons étroites aux murs de chaux et toits rouges.
 
Nous  rentrons à bord via le service de « ferry », de petits caboteurs qui tournent toutes les heures dans le mouillage, pour emmener à terre ou déposer à leur bord pêcheurs et plaisanciers . 
Il est en effet périlleux de débarquer avec son annexe ici, il n’y a surtout nulle part où l’amarrer. La houle atlantique brasse toute l’année le quai de débarquement, et il nous faut nous hisser à terre grâce à ces cordes à noeuds. Les enfants adorent jouer sérieusement pour une fois, les acrobates!!!
 
Lundi matin, direction le poste de police et les services d’immigration pour y terminer nos formalités. L’occasion de passer devant l’église, austère, avec son clocher en tôles de cuivre,

 la (petite) prison.
Ici, la voiture la plus courante, c’est une Land Rover, couronne britannique oblige, et de préférence la Defender.

 

En ce lundi matin, la petite ville est animée, tout le monde va faire ses courses ou travailler, et s’arrête sur les trottoirs pour papoter. Les retraités squattent les nombreux bancs publics : je vois que ce petit pays a su conserver le précieux art de la conversation, à l’impromptu, dans la rue : tout le monde semble être capable de perdre 2 à 3mn (ou plus) de son temps pour papoter avec son voisin, sa vieille tante, ou même un inconnu.
En effet tout le monde nous salue, se salue : j’aime cette marque de politesse et d’humanité qu’on ne retrouve guère que dans les petites îles, les petits villages ou sur les sentiers de randonnée. 
Aujourd’hui, le soleil est de sortie, j’en profite pour prendre en photos certaines des maisons les plus anciennes de la ville
 

Nous déjeunons d’un savoureux sandwich toasté à l’anglaise : croustillant et moelleux à souhaits,
et prenons de l’internet chez « Anne’s place », haut lieu du nautisme de la ville depuis plusieurs décennies : c’est là , sur les hauteurs du jardin de chateau,

que les yachties se donnent rendez-vous pour y déjeuner, récupérer leurs emails, échanger livres et revues, récupérer le linge de la laverie etc..… Aujourd’hui, ce n’est plus Anne qui tient la boutique, mais Sally, et c’est toujours aussi sympa! Les gâteaux, en particulier, sont succulents : apple crumble, shortbread, blueberry pie, carrot cake, brownies, et d’irrésistibles guimauves à la noix de coco: tout est fait maison, et délicieux.
Certains équipements sont d’époque, comme ces interrupteurs de lumière que l’on actionne en tirant sur un bout : les enfants en raffolent! Amusant également, le lavabo encastré dans le muret.
En rentrant au bateau, nous passons devant le palais de justice,
Aujourd’hui, la houle n’est pas trop forte, et nous méditons sur la force des vagues qui se jettent sur le quai chaque seconde; 
Arthur est ébahi de voir le numéro sur la plaque d’immatriculation : n°7! Il y a en vérité plus de 5000 voitures sur l’île, pour environs 4000 habitants….Nous chercherons pendant tout le séjour la n°1, sans succès…. mais nous avons repéré la voiture du Gouverneur, ou plutôt de « Madame » le Gouverneur, une anglaise bien sûr, avec une plaque couronnée. 
Ce matin à bord de Moby, il y a école, comme (presque) tous les matins, mais il y aussi matière à digression : Loïc a besoin de d’aide de petites mains (surtout de petits doigts fins et forts) pour réparer le moteur électrique des toilettes tribord. Arthur et Victor se dévouent et prennent sur leurs temps d’école pour aider leur papa.
Quelques heures plus tard, hourra!, les toilettes fonctionnement de nouveau!! Dans n’importe quel port du monde, nous aurions passé commande d’un nouveau moteur, attendu 48h tout au plus, fait l’échange et jeté le vieux… Ici, rien de tout cela : un peu d’huile de coude, de jugeote, de ténacité, de petits doigts agiles, le tout pendant plusieurs heures, et le tour est joué! Une belle leçon encore une fois pour les enfants, et qui nous fait tous réaliser combien l’obsolescence programmée de nos appareils pourrit et pollue nos vies.
 
Pour fêter cela, nous tirons les rois! Puisque nous avons décidé de terminer notre tour du monde sans four-faute de réparateur et de pièces de rechange adéquates, je tente la cuisson dans la machine à pain. Après le pain de mie, les brioches, les cakes d’anniversaire, la galette des rois semble réussie. 

IL faut dire que par chez nous, la galette des rois c’est un gateau breton et rien d’autre. Cette année, elle aura un petit air rectangulaire, la machine à pain ne permet pas d’autre forme. Dévorée en moins de 15mn, c’est un succès!

le roi et sa reine

 
Pour les gourmands voici ma recette, très simple, mais pour laquelle il faut impérativement respecter la texture du beurre :  en pommade, c’est à dire mou, mais pas fondu :

Ingrédients : 

§      250 g de beurre en pommade (eh oui, il faut ça, une plaquette entière y passe!!!!)

§       250 g de farine

§       100 g de sucre fin

§       4 jaunes d’oeufs : 3 pour le gâteau plus un jaune d’oeuf pour le glaçage

§       1 mesure de rhum

§       1 gousse de vanille ou d’extrait de vanille ou un sachet de sucre vanillé

Recette

§       Battre le beurre et le sucre jusqu’à ce que le mélange blanchisse et gonfle

§       Ajouter le rhum, la vanille puis les 3 jaune d’oeufs un à un

§       Verser dans un moule à manqué rond et haut

§       Glacer avec le 4 ème jaune d’oeuf battu

§       Décorer de croisillons avec la pointe du couteau

§       Enfourner 40 mn à 180°

§       Laisser refroidir. C’est encore meilleur le lendemain. Mais c’est très rare que l’on résiste à attendre autant….

 
En tout début d’après-midi, nous prenons l’annexe

et profitons du rayon de soleil pour aller plonger sur l’épave du Papanui ce vapeur transporteur de charbon qui, suite à une avarie en mer au large de Ste-Hélène, avait fait demi-tour, pour finalement s’échouer devant Jamestown. Tous les passagers avaient pu être évacués, et le bateau brula pendant plusieurs heures avec sa cargaison de charbon.
 
La visibilité est excellente, et le soleil au rendez-vous. Le site est immense, le bateau en lui même faisait plus de 100m de long. Nous distinguons bien ses différentes parties. Le pont,les cuves à charbon,

 la proue

 

 
Un peu plus tard dans l’après-midi, nous filons explorer la côte en annexe
Nous laissons le mouillage de Jamestown dernière nous : nous avons repéré une petite anse accueillante, Lemon Valley, qu’il nous tarde d’explorer. Toute la côte de Sainte-Hélène est ponctuée par ces courtes vallées escarpées, où il est quasi impossible de débarquer : c’est pour ses qualités de forteresse naturelle que le lieu a été choisi pour y incarcérer Napoléon, que les Anglais, mortifiés, avaient déjà laissé s’échapper de l’île d’Elbe. L’homme, une fois libéré avait été rejoint par ses fidèles et une véritable armée, que les anglais et leur alliés des autres monarchies européennes devaient de nouveau combattre, jusqu’à la fatidique défaite de Waterloo. C’est suite à cette dernière bataille perdue que Napoléon se rend aux Anglais, qui décident de l’exiler à Sainte-Hélène. L’île était déjà lourdement fortifiée pour protéger les installations et les bateaux de la « East India Company » qui y faisant escale au retour des Indes, richement chargés de cargaisons exotique. Mais, en même temps que Napoléon dans l’Atlantique sud, pas loin de 2000 hommes furent envoyés. De nombreuses autres fortifications, bastions, canons et tour de guet furent érigées autour de l’île.
Ce qui a attiré notre oeil, c’est un petit ponton,
qui sera pratique pour débarquer, et une grotte servant de lieu de BBQ!

Le lieu est très fréquenté parait-il l’été et les week-ends.
Plus loin, nous longeons la plage et les fortifications, et apercevons un bâtiment : parfaitement restauré, l’ancien bâtiment servait de lieu de quarantaine pour les esclaves ; il est disponible à la location.
Nous remontons le sentier qui serpente au fond de la vallée, et nous arrêtons prendre le thé sur les hauteurs.
Au retour, nous remarquons des « souffleurs » à la côte. Ce sont des spray d’eau de mer, pulvérisés parfois plusieurs mètres au dessus de l’eau.

C’est la combinaison de la houle, des marées et de roches trouées qui crée cet amusant phénomène. Là, nous nous faisons copieusement asperger!

 
En fin de journée, les lumières sont sublimes

 Nous avons la visite de James et Hannah, avec leurs 3 enfants.Croisés brièvement à Maurice, nous n’avions pas pris le temps de faire connaissance. Ils bouclent leur tour du monde à la voile en famille, puisqu’il sont partis il y 5 ans, de Ste-Hélène justement!! Ils sont de retour sur leur île depuis à peine un mois, et commencent une activité de services aux bateaux de passage.
 

Le lendemain, c’est une grosse journée d’excursion : nous avons réservé un guide qui va nous conduire tout autour de l’île, et en particulier sur les traces de Napoléon à Ste-Hélène. Harry est un ancien chauffeur de bus scolaire. Depuis sa retraite, il officie comme guide, et s’est fait une spécialité du récit historique. La visite commence au pavillon des « Briars » , anciennement propriété de la « sainte » famille Balcombe (« saint » et « sainte », c’est ainsi que se nomment les habitants de ST-hélène ;-)), et qui a hébergé Napoléon pendant quelques semaines à son arrivée le temps que son logement définitif de Longwood soit prêt : ce pavillon d’été n’était à l’époque une simple pièce dotée d’une terrasse, et il se dit que Napoléon y a vécu les plus agréables journées de sa détention.

The Briars

les jardins

 
Depuis, les Balcombe ont offert le pavillon à la France, qui co-gère le site avec l’office du tourisme de Ste-Hélène. Derrière cette pièce, on trouve les appartement des amiraux! C’est donc là que logent les personnalités françaises de passage à Ste-Hélène.
Nous avons droit à une visite guidée avec Magellan le guide officiel du site, et tout un groupe de chinois, venus passer la semaine à Ste-Hélène, et que nous croiserons régulièrement sur les sites d’intérêt.  Voici donc l’intérieur de the Briars, une simple pièce, très lumineuse. 
Il pleut, le temps est maussade, mais le jardin, superbe tout de même.
Nous quittons la vallée de The Briars, où s’est installé le consul de France, Mr Martineau, devenu LE spécialiste de l’époque napoléonienne à Ste-Hélène, et auteur de plusieurs ouvrages faisant autorité sur le sujet.

Puis nous voilà quelques kilomètres plus loin à Longwood, la demeure où Napoléon séjourna plus de 5 années. Le temps s’est encore dégradé, il pleut dans discontinuer, comme du temps de Napoléon, qui se plaignait du climat humide et sinistre de Ste-Hélène.
De l’extérieur, la maison ressemble étrangement à Créach’meur, notre maison en bretagne, un ancien sémaphore.
C’est sans doute le style militaire de l’époque qui veut ca.

La visite est fort interessante, on y découvre mille détails de la vie de l’empereur :
  • sa détestable relation avec Hudson Lowe, le général anglais en charge de sa captivité, qui refusait absolument d’appeler  Napoléon  « Empereur » , car Les anglais ont toujours refusé de le reconnaitre comme tel
  • la paranoïa maladive de Lowe ci qui craignait plus que tout une seconde évasion de Napoléon, qui rendit le séjour de Napoléon fort pénible
  • ses soucis de santé incessants : problèmes digestifs, maladies de peau, fièvres de malaria…. Il était à la fois très robuste, animé d’une volonté de fer, mais de santé finalement plutôt fragile.
  • Il a vécu à Longwood les 6 dernières années de sa vie, entouré d’une vingtaine de proches et de leur familles, fidèles et dévoués compagnons de route, prêtre, serviteurs….qui formaient comme une petite cour française. Ces hommes, femmes et leurs enfants étaient libre, eux, car c’est de leur propre gré qu’ils ont suivi Napoléon en exil, mais très surveillés;
  • 1500 hommes ont été dépêchés sur l’île pour le garder : il n’était donc pas libre de ses mouvements : la moindre promenade était surveillée, chaque visite à l’extérieur de Longwood devait être négociée, préparée et sérieusement encadrée : elles furent assez rares d’ailleurs.
Dernière visite à thème : la tombe de Napoléon, dont la dépouille et le cercueil restèrent 20 ans sur le sol britannique, avant qu’elle ne soit rapatriée en grande pompe en 1840, pour reposer, selon sont souhait, à Paris, près des Français. Ses cendres sont aujourd’hui au Panthéon.
Il avait lui-même choisi le lieu de sa sépulture, le fond d’une petite vallée non loin de Longwood où il aimait à se promener. L’endroit est charmant… et très humide!! Normal, il pleut vous me direz. Mais la qualité de la mousse, épaisse, spongieuse, sur les bas-côtés nous fait penser que ce chemin reçoit fort peu les rayons du soleil…

Le site, particulièrement bien entretenu, est tout comme The Briars et Longwood, propriété des Domaines de France.
Ces visites à caractère historique nous font réviser (un  peu) notre histoire de France, et nous pencher à tout le moins sur l’héritage laissé par Napoléon 1er : la Banque de France, le code Civil qui abolit les privilèges, les lycées d’état qui forment les élites, les préfets nommés à la tête de nouveaux départements et l’ordre de la Légion d’Honneur qui récompense les français méritants. Autant de réformes qui modernisent la France de l’époque.
Nous continuons nos visites sous la pluie…
 
Dernier stop de la journée : The Plantation, la résidence du Gouverneur, qui en l’occurence est en ce moment une femme. Elle est apparemment très aimée, et est particulièrement active dans la défense du droit des femmes, et l’aide aux nécessiteux.

Ici les gouverneurs, un peu comme nos préfets, sont nommés pour une courte période, 2 années, renouvelable.
Dans les jardins, des tortues offertes par les Seychelles se baladent en liberté.

Nous redescendons vers Jamestown , ou il fait très beau, alors que nous avons passé la journée sous la pluie dans les hauts… grrr, c’est un peu rageant, mais typique du climat saint. 
L’état de chargement des batteries du bord nous le confirme, en bord de mer, c’était grand soleil!!

La visite du musée de Ste-Hélène nous confirmera que le climat est ici très lié au relief : les côtes sont sèches, arides et ensoleillées (type savane), puis plus on avance dans l’intérieur des terres, plus l’humidité et la couverture nuageuse augmentent, en gradients progressifs, jusqu’à atteindre dans les vallées boisées de l’intérieur de l’ile une hygrométrie parfaite pour les fougères, mousses et lichens qui ne voient jamais le soleil.

aridité de la roche volcanique sur les côtes

fleurs tropicales près du littoral

savane côtière

vertes vallées

sous-bois moussus

Le RMS (Royal mail Service) Ste Helena est arrivé la veille, c’est l’avant dernière rotation du célèbre navire affrété par la couronne britannique pour la dessertes des île Ste Hélène  et Ascension.

En opération depuis les années 80, il est aujourd’hui mis en vente car l’aéroport de Ste-Hélène est enfin opérationnel! Cela fait 70 ans que les « Saints » attendent leur aéroport. Ascension, la petite voisine, qui n’est peuplée que de 900 personnes, et encore, tous travailleurs sous contrats (pas de famille ni d’enfants là-bas) en est équipée depuis … 1942!
L’histoire de l’aéroport de Ste-Hélène, c’est un peu celle de Notre Dame des Landes : à l’exception notable de son volet écologique, et de son dénouement, puisqu’il est opérationnel depuis octobre dernier. Les lenteurs administratives, ajoutées aux tergiversation sur le choix technique de l’emplacement, à un coût pharamineux (plus de 300 millions d’euros) et de réelles contraintes météorologiques sont la raison de ces retards. Ajoutons à cela la crise financière de 2008 et les alternances politiques des décisionnaires, et on obtient pas moins de 70 ans d’attente pour obtenir l‘équipement tant attendu. Sans doute un record mondial…
Alors, depuis octobre 2017, une desserte hebdomadaire depuis Johannesburg sort Ste-Hélène de son isolement.
 
La moitié du traffic est ilien : des familles, des étudiants, des travailleurs, des malades partent vers l’Afrique du Sud et continuent le plus souvent vers Londres. L’autre moitié, c’est le tourisme qui l’apporte : 20 à 30 passagers par semaine.
Car l’île à beaucoup à offrir : son isolement la rend attractive bien sûr, mais aussi son cadre de vie, son passé historique, sa faune (requins baleines, raies, dauphins, oiseaux endémiques), sa flore, sa géologie/géographie unique sont des atouts. Randonnée, VTT, plongée attireront les touristes, tout autant que le .
Notre ferry n’est que dans 30 mn, nous nous offrons une pause café-gateaux à l’hôtel du Consulat. Là encore, les pâtisseries à l’anglaise sont délicieuses et joliment présentées  : carrot cake, cupcakes au gingembre, muffins triple chocolat, victorian sponge cake, lemon meringue pie….

Le lendemain, c’est jeudi, jour de livraison de fruits et légumes par les maraichers locaux, nous partons à terre faire les courses.  Les différentes supérettes de Jamestown sont livrées une fois par semaine par les petits producteurs : il vaut mieux y aller tôt pour être bien servis. Comme souvent dans les petites iles, chaque commerçant a ses produits, phares, et je trouverai mon bonheur un peu partout :
  • à la coopérative, des fruits et légumes originaux  : physalis, calamanci (mini mandarines), fèves, courges butternut
  • chez First, des légumes locaux : carottes, choux-fleurs,  chou vert, brocolis, patate douce, igname
  • chez Queen Mary, les fruits d’importation (pommes et oranges à jus)
  • Chez Thorpe l’excellente viande locale : filet de porc, steak de boeuf, cotes d’agneau, et le pain de la boulangerie Solomon.
  • chez Tinkers, le beurre, importé congelé, au prix prohibitif de 14€ le kilo….GLOUPS.  Mais il est difficile pour nos petits bretons de s’en passer.
A noter chez Queen Mary le tableau d’affichage indiquant les produits en stock, non montrés en rayon : cela va des matelas, aux tables de jardin, en passant par des extincteurs, des WC, de la chaine de mouillage…
 
Heureusement, il existe un système original de « consigne » informelle : derrière les caisses, des étagères permettent de déposer ses provisions, une fois les courses payées, et d’aller les continuer ailleurs…. Comme la rue est en pente, en redescendant, on récupère à droite à gauche tout ses sacs…
 
Notre prochaine traversée est d’une dizaine de jours, il nous faut donc un avitaillement conséquent et je suis ravie de ce que j’ai pu trouver dans les magasins, bien meilleur que ce à quoi je m’attendais : les légumes ont le même goût savoureux que le panier de légumes bio de Nicolas, mon maraicher en Bretagne. C’est en effet l’un des aléas du voyage : on se nourrit de ce que l’on trouve, et on fait ses courses au plus pratique et au plus proche pour l’embarquement des vivres, car il est rare que nous ayons un véhicule…
Alors, les fruits et légumes ne sont le plus souvent ni bio, ni du marché.
Mais la grande surprise de ce voyage et de voir que la qualité moyenne des produits est excellente, l’essentiel de ce qui est vendu est produit localement, et cette tendance va en s’accentuent, au profit de la qualité, du goût, et de la baisse des prix!
Seule exception au tableau : l’île de Cocos (Keeling) dans l’Océan Indien, qui importe par avion 100% de sa consommation d’Australie : une aberration. D’autant que l‘on sait aujourd’hui, grâce aux progrès de la permaculture, que la production de légumes est possible même sur des atolls de sable sous les tropiques.
A Sainte-Hélène, la viande est locale, et les infrastructures sont dimensionnées : l’abattoir traite une dizaine de bêtes par semaine. Seule ombre au tableau : pas de lait frais local, pour des raisons de réglementation : les anglais imposent le lait UHT! Grrrr. Pas de bon lait de vache fermier, ni de beurre, ni de fromage local.
Mais globalement, ce petit territoire de 4000 âmes est assez exemplaire du point de vue de l’autosuffisance.
De retour au bateau, nous longeons comme d’habitude le quai, qui en ce moment grouille d’opérations de déchargement du RMS St-Helena.

Le port du casque est donc obligatoire sur les derniers 200m du quai.

Vendredi matin, nous allons tous les 5 au poste de Police faire nos formalités de départ, puis en profitons pour faire un tour au musée voisin.
Il est tout petit, mais passionnant de toute la richesse historique et stratégique de cette île. Les enfants sont emballés, et se passionnent pour toutes les vitrines, il est vrai très bien faites et richement illustrées d’objets du quotidien, maquettes, uniformes….
 
Un premier pôle traite des bateaux qui ont relié l’île au continent Africain et à son territoire de rattachement, la Grande Bretagne.
Une succession de caravelles, brigantines, frégates, goélettes… puis de navires modernes.

Celle aussi des nombreux naufrages autour de l’île, qui font la joie des plongeurs, comme ici la photo du Papanui,  épave sur laquelle nous avons plongé. .
On y découvre ausssi le destin du bois d’ébène local, que l’on croyait disparu, puis retrouvé par deux botanistes dans les années 80 sur les falaises abruptes, dont on a recommencé l’introduction par boutures dans plusieurs endroits de l‘île.
Moins chanceux, le perce-oreille géant, disparu dans les années 60, et dont on déplore le pillage par des botanistes Belges…
On découvre aussi le profil sous-marin de l’île, cone volcanique émergent
L’uniforme d’apparat du gouverneur et son impressionnant chapeau de plumes blanches!!
Le coffre d’écriture de la Reine Victoria : c’est là qu’elle stockait ses livres, journaux intimes, etc…
En haut, Anna apprend à se servir des pavillons comme signaux.

Un peu plus loin, des déguisements sont à disposition de petits et des grands! Marin ou pompier?
On en apprend aussi un peu plus sur les moyens de subsistance des iliens tout au long des siècles : produire fruits et légumes, et les vendre aux navires de passage est une longue tradition.
Pour les femmes, au siècle dernier, c’était la broderie, pour les hommes, les filatures de lin, grâce aux plantes importées de Nouvelle Zélande.
 
En sortant du musée, nous assistons au départ du RMS St Helena, qui part ravitailler Ascension, autre île de la couronne Britannique. A son bord, une centaine de travailleurs, dans les telecom essentiellement et les services, car Ascension est une des bases importantes de télécommunication de la Nasa. Il n’y a pas de village, seulement des employés sous contrat.
A bord également quelques dizaines de touristes qui voyagent par cargo, original, quand on a du temps!

 
Nous partons aussi explorer le sentier côtier nord, qui mène à l’ancien poste de télécommunication de l’île : c’est là qu’était installé le  premier poste de télégraphie, dont le cable relie encore l’île à l’Afrique du Sud.

Le site est intéressant. Nous découvrons un vrai petit village, avec un joli plant de coton

la bogue du coton

la fibre de coton, que les enfants commencent à filer

la fleur de coton, aux douces pétales

plus une garnison,

 des bunkers,

 

des canons, des bureaux, un poste de commandement

et la vue sur la ville et le port de Jamestown méritent les 20mn de grimpette!
Nous déjeunons une dernière fois chez Anne’Place, envoyons nos derniers emails, postons les dernières cartes postales aux copains de l’école.
Pendant que Loïc rentre au bateau avec les enfants préparer Moby pour le départ, je m’offre une petite escapade d’une heure le long du ruisseau qui traverse la ville. Cette promenade, dite « the Run », est originale, le long des berges citadines, entre potager,

 jardins,

 terrasses de maison….
En fin d’après-midi, nous appareillons pour le Brésil.
 
Bye-bye St-Hélène, qui fut une escale totalement unique sur notre parcours, loin des images des cartes postales d’eaux turquoises et de sables blancs, mais très attachante!
  1. Didier Rey says:

    Salut les sympathiques bretons, je viens de terminer le dernier tome disponible de vos carnets de voyages. Tellement émerveillé devant tant de splendeurs et de richesses. Un immense merci de nous faire vivre, avec certe beaucoup de jalousie, ce film exceptionnel. Aucun oscar n’est assez grand pour celui là.
    En attendant impatiemment la suite,
    Kenvo avel
    Kenavo ar c’hehtañ
    Didier

    • Bénédicte says:

      Merci beaucoup Didier, nous pensons beaucoup à vous autres terriens, en particuliers amis et anciens collègues 😉,et sommes très heureux de partager nos aventures. Je dirais même que c’est la moindre des choses que de les partager. ☺️

  2. Valérie says:

    un bout du monde en marge des radars touristiques. Et pour cause !! Pas mal pour s’isoler et se retirer loin de la modernité. Quelle opportunité de l’avoir découvert…pour se dire qu’une fois suffit, non ?

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