Cocos(Keeling)

Certaines escales sont plus mémorables que d’autres, et le séjour d’une semaine que nous avons fait au mouillage de Direction Island, à Cocos(Keeling) se range parmi les plus agréables de la catégorie « ile déserte ».

Direction Island

Cette escale est pour nous providentielle : dans l’Indien, peu de stops en effet sont possibles sur la route des Alizés qui nous mène de l’Indonésie à  l’Afrique du Sud.

Cocos (Keeling) dans l’Océan Indien

Le mouillage destiné aux bateaux de passage, sous le vent du motu Direction Island, est absolument idyllique, et parfaitement aménagé. Nous nous reposons donc quelques jours avec bonheur, car nous sommes dans une période de navigation intense.

au mouillage à Direction Island

L’atoll de Cocos Islands compte plusieurs îles, dont 2 seulement sont habitées ;

L’atoll de Cocos(Keeling)

West Island

West Island au Sud-Ouest

et Home Island,

Direction Island et Home Island au nord

une troisième, Direction Island étant une destination de week-end pour les iliens, et le seul mouillage autorisé pour les bateux de passage.

le ponton flottant

Les habitants de West island ne viennent en ferry que 2 fois par semaine, le reste du temps, la plage est à nous! Le site a été aménagé pour recevoir les plaisanciers mais aussi les iliens  de passage à la journée ou venus camper le w-e. Comme toujours, les australiens sont pragmatiques : tables ombragées, sites de bbq, ponton flottant, toilettes!!, et même une réserve d’au douce pour se rincer. 

les voiliers de passage on aussi amélioré le confort : hamacs, balançoire, panier de basket…

La plage est tout simplement superbe, le sable fin, et la baignade vraiment agréable.

Et en plus nous sommes en famille, et  entre amis! Mon frère Thomas nous a rejoint (avec sa guitare!) à Bali pour la traversée,

Seulement 4 bateaux au mouillage, dont deux catamarans d’amis qui naviguent aussi autour du monde et que nous retrouvons : nous naviguerons tous les 3 ensemble jusqu’aux Seychelles.

4 bateaux au mouillage de Direction Island (et un cinquième au milieu, inhabité…)

Une famille d’Israéliens sur Shuti , un lagoon 380 : Momi et Lilach naviguent avec leurs 3 garçons de 7, 10 et 12 ans,  Dror, Eyal et Yoav. Nous les avions déjà croisé à Panama et à Fiji.

Moby devant, Shuti a gauche, et Cool Runnings à droite. Au milieu, un bateau abandonné.

et Cool Running, le cata (Lagoon 400) de Dave et Gudrun avec 2 ados à bord, Gaby 11 ans  et Ben 13 ans, des américains  d’origine sud-africaine avec qui nous avons navigué dans les Iles Sous le Vent et que nous avions retouvé à Bali.

Cool Runnings

Dave et Gaby venus nous accueillir à notre arrivée!

Nous faisons aussi la connaissance de Brigitta et Erik, sur Arial IV, un couple de suédois un peu plus agés, qui réalisent leur second tour du monde-: ils ont fait le premier il y a 20 ans avec leurs 3 garçons. Depuis, ils ont écrit 3 livres, navigué jusqu’au cercle arctique, et franchi le passage du Nord Ouest : ils sont célèbres en Suède parmis les gens de mer, et très inspirants pour nous!

les autorités sur Ariel IV pour les formalités d’arrivée

Gudrun, Birgitta, Lilach et Helen, une ilienne de Cocos!

Les enfants ont tous été mis en vacances pour l’occasion- car chez les enfants de bateau, il n’y a pas vraiment de vacances scolaire, tout le monde travaillle quelques heures le matin,  le plus souvent 6j/7j. Mais chez les petits francais abonnés au CNED, c’est différent : l’année scolaire est plus courte, 9 mois de septembre à juin, plus intense avec 3 à 4h de travail par jour, mais avec à la clé 2 mois de vraies grandes vacances en juillet/août!

Nous passons 8 jours à la fois actifs et reposants. Le spot est parfait pour la planche à voile,Loïc grée donc le matos pour toute la famille,et coache!

Mon frère Thomas qui nous a rejoint à Bali s’entraine au jibe,

Frère et soeur

Tom en action

moi je reprend mes marques et me remets facilement dans les straps et au harnais.

Bénédicte au planing

Arthur aussi fait un peu de planche. L’objectif :  faire du travers.

Victor progresse tous les jours et finit par vraiment partir au planing en mettant le harnais et les pieds dans les straps !!! J’entend Loïc hurler « Yeahh » je ne sais qui est le plus heureux du papa ou du fils!

Loïc a gréé le matos sur Moby,

puis nous le laissons la nuit à poste sur l’île.Pour le fun, Tom se fait quelques bords de nuit sous la pleine lune!

nav’ de nuit

Dommage, les progrès de Victor vont être interrompus en pleine progression : il s’est fait mordre par un gros poisson alors qu’il nageait seul non loin du ponton et de ses camarades.

Rien de grave heureusement, la plaie est superficielle. La chance, c’est que nous avons un médecin dans le mouillage, Eric examine la plaie, il n’est pas inquiet, la blessure est superficielle.  Nous désinfectons et mettons une crème antibiotique préventive, car il s’agit d’une morsure d’animal sauvage- c’est ce que recommande notre très pratique « Guide la faune marine dangereuse du Pacifique et d’Océanie».  D’après la description que les enfants font du poisson qui leur tournait autour depuis un quart d’heure, il s’agit sans doute un gros mérou, peut-être agacé par les incessants aller-retour des enfants entre le quai et la plage.

Le snorkeling est sympa :

petit snorkeling entre filles, Anna adore ca!

déjà, derrière le bateau, quelques patates de corail recèlent des petits requins pointe noire, très curieux et territoriaux, ils ne nous lachent pas d’une semelle.

requin pointe noire à quelques mètres de Moby

Nous croiserons aussi un banc de poissons Napoléon, qui ressemblent à d’énormes poissons perroquet aux couleurs fade et bossus sur la tête.

banc de Napoléons

Mais le mieux, c’est le snorkeling dérivant sur le RIB,

C’est parti pour une plongée sur le RIB

sorte de fausse passe par laquelle entre des flots d’eau dans le lagon, et qui forme un petit canyon sous-marin.

Canyon sous-marin

Il n’y a pas moins de 3 à 4 noeuds de courant. Nous nous laissons dériver accrochés au bout de l’annexe, nous avons la sensation de voler au-dessus du corail!

Victor et Loïc préfèrent nous suivre derrière l’annexe

Les requins sont tapis au sol dans la journée, des colonies de poissons Napoléons habitent les lieux.

requins pointe noire tapis au sol


Les enfants passent des heures sur la plage avec leurs copains, il y a là une joyeuse bande :

Arthur teste son voilier

8 enfants entre 5 et 13 ans, qui passent leurs après-midi à jouer autour du ponton flottant, faisant d’incessants aller-retour à la plage avec les vieux longboard de sauvetage laissés par les habitants. Ils ne manquent pas d’idées : forteresse pour Bernard l’Ermite, chateaux de sable, batailles de pirates…

IL y a là une petite vie de communauté, où chaque bateau laisse sa trace : une balancoire, un siège en bois, des hamac en filet de pêche,

un panier de basket, ou plus prosaïquement, un panneau commémoratif . Moby n’échappe pas à la règle et voici notre « oeuvre d’art ». Rien de très artistique, mais c’est efficace : une planche de bois flottés peinte au gelcoat de nos noms  : elle devrait rester en place quelques dizaines d’années!

Nos amis de Cool Runnings se sont donné beaucoup de mal en gravant une énorme planche de bois flotté.

Victor m’a réclamé une coupe de cheveux. Pas sûr qu’il y ait un coiffeur par ici, et dans tous les cas, ca nous prendrait la journée de nous y rendre, ce sera donc une coupe « fémézon » Comme nous l’avons promis aux enfants, nous organisons une soirée feu de camp sur la plage, sous le format « bring and share » anglo-saxon. Chacun apporte sa boisson et un plat que nous partageons ensemble.

Les enfants partent chercher du bois dans l’après-midi pendant que les garçons vont pêcher du poisson. Loïc nous ramène 3 jolis poissons perroquets, que nous les ferons en filets au BBQ, miam!

Nous allons lever les filets au bout de la plage.

Dave me donne un coup de main.Nous jetons les peaux et carcasses à l’eau dans le RIB, loin de la plage familiale ou se baignent les enfants. Les requins ne sont pas longs avant d’arriver. Et se jettent sur les restes, quitte à s’échouer!Les papas donnent un coup de main en apportant de gros morceaux de bois

magnifique feu!

Nous avions aussi prévu en plus des saucisses de boeufs australiennes et les traditionnels marshmallows à griller au bout d’une baguette!

On se régale!

Erik et Thomas sortent leur guitare. Re-belote quelques jours après. 

Birgitta et Erik ont initié Ben à la fabrication de Pizza.

les pizzas de Ben

Moby arrive avec ses fougasses, et Shuti avec des focaccia

les fougasses de Moby

la focaccia de Shuti

Tout le monde se régale!
: Soirée italienne, et encore un feu de camp, les enfants adorent!

Avec mon frère Thomas qui nous a rejoint à Bali et fait cette portion de chemin avec nous, nous partons faire le tour de l’île.
Le sentier est assez monotone, la végétation n’est que cocotiers, et la faune se résume à des rats (fort craintifs) et des moustiques! Nous faisons donc la balade au pas de course, l’intéret résidant essentiellement dans le parcours historique aménagé sur l’îlot : une quarantaine de panneaux en métal nous retrace l’histoire de Cocos(Keeling). Et c’est passionnant!!

Il est incroyable qu’une si petite île apparemment insignifiante recelle une histoire aussi riche!

Tout d’abord, par sa colonisation :

Découverte par le Captaine britannique Keeling en 1609 , sa position fut gardée secrete, et n’apparait sur les cartes que 2 siècle plus tard en 1805.

Elle attire l’attention d’un riche armateur, Mr Hare, ancien gouverneur d’une colonie britannique de Bornéo, et à la recherche de comptoirs à développer et exploiter. Il y envoie le capitaine Clunies-Ross, en éclaireur inspecter Cocos en 1825 : celui-ci défriches des terres, plante des céréales et des légumes, sonde le lagon, et fait un rapport tout à fait positif. Le sieur Hare revient s’installer l’année suivante avec une centaine de travailleurs malais, pour la plupart musulmans et s’installe sur Home Island. Il pensait y vivre paisiblement entouré de son harem – ll parait en effet que l’homme n’avait rien contre la polygamie. C’était sans compter le sieur Clunies-Ross, qui barque en 1827 avec femme, enfants, belle-mère, une partie de sa famille écossaise, et de solides matelots pour y installer une colonie très organisée. Le dialogue tourne court, c’est rapidement le conflit ouvert, et c’est finament Hare qui plie bagages et rentre à Londres, laissant à la famille Clunies-Ross la mainmise sur l’île.  4 générations de Clunies-Ross vont faire prospérer l’atoll de Cocos(Keeling) et régner en dynastie sur l’île :  plantation de cocotiers pour l’exploitation du coprah d’un côté, et un petit chantier naval de l’autre ; voilà de quoi assurer la subsistance de la colonie, ou plutôt de ce petit royaume féodal qui va persister pendant 150 ans! Finalement, c’est le gouvernement australien qui rachète à la famile ROSS-CLUNIES l’archipel en 1978, pour plus de 6 milions de dollars.

Autre visiteur de renom : le jeune Charles Darwin y fait escale en avec le navire d’Exploration le Beagle, en 1936 lors de son tour du monde en tant que naturaliste. Le jeune homme, qui deviendra l’un des plus grand scientifique de son époque, remarque que cette formation d’îles en couronne doté d’un lagon ressemble fort aux îles polynésienne. Il fait aussi le rapprochement avec les sondes qui donnent de très grandes profondeurs à quelques encablures seulement des côtes : l’ile serait le sommet d’une immense montagne sous-marine à forte déclivité. Il écrira à son retour en 1842 un taité sur la formation des atolls corallien qui a toujours cours aujourd’hui.

Autre fait historique : l’installation en 1901 de câbles télégraphiques sur Direction Island reliant l’Australie à l’Asie et au reste du monde!

Une véritable révolution des télécommunications pour le continent Australien, et l’établissement pendant plus de 60 ans sur Direction Island d’un véritable petit village britannique, avec fonctionnaires de la couronne, personnel de maison, costume colonial le soir,  régates le dimanche et parties de tennis aux heures perdues.

Cocos Keeling fut enfin le théatre fin 1914 d’une bataille célèbre de la marine australienne, aboutissant au naufrage du navire le plus recherché de l’armée allemande en Asie : le cuirassé vapeur Emden mené par le capitaines Van Müller , que l’on tenait responsable depuis le début de la guerre quelques mois plus tôt du naufrage et l’arraisonnement de pas moins de 24 navires marchands alliés, de nombre de batiments militaires francais et russes, et de la destruction la station de carburant alliée de Madras en moins de 12 semaines de combat : cela valu à l’Emden et à son capitaine une réputation de »flibustier des mers », et d’être poursuivi et chassé  par 60 bateaux alliés francais, japonais et russes, sans succès.

C’est finalement au terme d’une épique bataille navale entre North et South Cocos Keeling,  où une équipe d’allemands avait réussi à détruire la station télégraphique britannique, que le Captaine Von Müller se rendit au SMS Sydney, non sans avoir échoué volontairement son navire sur les récifs de North Keeling pour le rendre inopérant. Entre temps, l’autre équipe déposée à terre précédemment, menée par le lieutenant Von Mücke s’empare d’une vieille goelette qui était au mouillage , et réussit à s’échapper avec ses hommes , ralliant l’île de Sumatra en 3 semaines, puis le Yemen à bord d’un jonque chinoise en bravant le blocus britannnique de la mer rouge, et enfin après 5 mois de traversée du désert d’Arabie, de la Turquie, en Allemagne où ils furent accueillis en héros!! Même les alliés à la fin de la guerre, saluèrent la bravoure du lieutenant Von Mücke, et la grande dignité et le courage du capitaine Von Mûller.

Aujourd’hui cet atoll qui ressemble fort aux atolls polynésiens des Tuamotu est passé sous la coupe des australiens, et abrite un demi-millier de malais habitant Home Island et vivotant du revenu mininum australien,  et une centaine d’autochtones australiens, essentiellement des fonctionnaires  assurant le minimum de services à l’atoll (cabinet médical, aéroport, services de douane et d’immigration, instituteurs,  etc…) et installé sur le motu de West Island. Très peu de tourisme, aucune industrie, ni artisanat, ni agriculture pas même vivrière, ni pêche autre que vivrière : l’atoll est 100% sous perfusion australienne et dépend des importations… L’intérêt que porte l’Australie à cet atoll est certainement essentiellement géostratégique.

En conséquence, l’approvisionnement est cher, mais a le mérite d’exister. L’île est strictement musulmane, les femmes sont voilées,

la supérette

et le vin….. sans alcool!.

du jamais vu! du Chardonnay sans alcool.

Nous avons un peu d’internet pour mettre le blog à jour,  un mouillage calme où il fait bon dormir la nuit, et une plage magnifique où les enfants passent leurs journées avec leurs amis : que demander de plus?!

Nous aurons l’occasion de visiter brièvement Home Island, pour y faire quelques courses, récupérer de l’internet. Nous prenons le même ferry qui amène les iliens à la plage le week-end!

le ponton d’accostage du ferry

en attendant le ferry…

des pointes noires passent…

et toujours la grande préoccupation des australiens : la SECURITE!

C’est parti pour Home Island, avec Birgitta et Erik.

Dommage, c’est samedi, le musée est fermé, ainsi que le restaurant et le café. Nous déambulons dans le village,

repérons l’épicerie,

pic-niquons dans l’herbe, faisons quelques courses et passons quelques heures sur internet : inscription de Victor au CNED, commande de matériel pour les Seychelles, consultation de la météo….

la meilleure connexion internet de l’île se trouve sous l’antenne principale, près du « Community Center »

Bye-Bye Tom!

Quelques jours plus tard, j’accompagnerai Thomas à l’aéroport sur West Island, à 15mn de ferry de là.

le quai du ferry à West Island

Une village en forme de garnison militaire avec ses maison toutes identiques et ses bungalows à louer aux militaires de passage sur l’île, c’est à peu près tout. Là aussi ,il est tout juste 15h, et tout est fermé, restaurant, café, supérette…..

Petite curiosité, le terrain de golf de part et d’autre de la piste d’aviation qui longe le village.

le golf

Après un séjour de 8 jours très agréable, nous levons l’ancre pour les Chagos, à 1500NM de là : nous y serons dans une semaine.

  1. Laeti says:

    Quel plaisir ce récit. On vous embrasse fort,
    Et ta fête d anniversaire? On veut voir le gâteau maison…

    • Bénédicte says:

      J’ai fêté mon anniversaire aux Chagos, à lire dans le prochain article d’ici quelques jours. 😉

    • Bénédicte says:

      Merci Isabelle et Francois, contente de nous savoir toujours en contact grace au blog!

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