Escale aux Mascareignes / 2 : Saint-Brandon

St-Brandon fait rêver beaucoup de Mauriciens :

la plage de Chaloupe

des plages de carte postale, un archipel d’îlots poissonneux distant de 240NM de l’île Maurice. Mais les vents sont rarement portant, au mieux travers à l’aller comme au retour, et bien souvent contre le vent et le courant, rendant les traversées souvent inconfortables. Si bien que les récits de traversées mouvementées sont nombreux, et que beaucoup se découragent d’ affronter l’Océan Indien hors des lagons protégés.

L’avantage est que la destination est encore très préservée, la pêche y est très bonne, et les plages désertes. Les amateurs de kitesurf, de pêche et de plongée se régalent….

Arnaud et Laetitia

C’est le cas de nos amis Arnaud et Laetitia, que nous avons embarqués avec nous à Maurice.
Quand Arnaud habitait, enfant à l’île de la Réunion, il entendait son père, son frère, et leurs amis vanter St-Brandon, sans jamais avoir pu faire partie de l’équipage. Alors voilà, Arnaud, pour tes 50 ans, nous t’emmenons à St-Brandon!

Je suis tout autant emballée, et pour les mêmes raisons : Loïc a pu y aller à deux reprises avec notre ancien voilier, Nomade, et je n’ai jamais pu faire partie du voyage non plus. Alors merci Loïc, de m’emmener découvrir ce petit paradis.

Bénédicte et Loïc

Avec Moby, nous avalons facilement les 240NM de trajet, et jetons l’ancre devant l’ilot Coco à 19h, après avoir quitté Port Louis à 15h la veille.

Arnaud et Laeti prennent leurs marques sur Moby : nous avons la chance d’avoir à bord des amis qui naviguent beaucoup en Bretagne sur leur Fist 31.7. Le compteur sur Moby annonce 30 000 NM de puis notre départ de La Grande Motte il y a 20 mois. 

Nous ne sommes pas seuls : outre les pêcheurs de Raphaël Fishing, il y a un autre catamaran,Cheers, qui repart le lendemain.

Ca n’est donc pas la foule à St-Brandon, et pourtant, nous sommes en pleine saison. Les mi-saisons sont en effet les meilleurs périodes : l’été reste toujours périlleux avec les dépressions tropicales et cyclones, l’hiver a l’inconvénient d’offrir un alizé souvent très musclé et une mer grosse, rendant pénibles les traversées. Octobre/novembre et avril/mai sont donc les 2 meilleurs fenêtres.

Pendant la traversée, la pêche a été très active, mais pas fructueuse : nous aurons de nombreuses touches, et ferrons une bonite et une superbe dorade, qui toutes deux se décrocheront à la remontée à bord. Le poisson a sa chance, et c’est aussi bien comme ça! Il faut dire que nous n’avons pas de véritable gaffe à bord, un objet à rajouter sans doute sur la liste de courses, qui élèverait grandement notre rendement.

Au petit matin, nous savourons le premier petit dèj,

et découvrons le paysage.

Impatients, Arnaud et Loïc partent très vite chercher des langoustes, la valeur sûre de St-Brandon! En 2 heures de pêche ils nous rapportent 7 ou 8 jolis spécimens.La technique du bord pour les conserver sans prendre trop de place dans le frigo, c’est de les ébouillanter une minute, puis de les décortiquer : ensuite, il est facile de les cuisiner : poêlés, en carpaccio, en salade, en sauce, en cari….

Il nous tarde de descendre à terre

: la plage est sublime, le sable a l’air très fin, et le spot super pour le kite. Après la séance de pêche du matin, les 2h d’école réglementaires, et un rapide picnic, nous descendons gréer le matos
: nous aurons à l’eau en permanence 2 kites et 1 windsurf, à partager entre 4 adultes et un ado!

Ca tombe bien, tout le monde est polyvalent : windsurf, kitesurf , twin-tip ou directionnelle … Seul Victor n’est pas encore autonome en kitesurf, et préfère se consacrer à ses progrès en planche. 

Anna na pas le droit de se baigner, la pauvre, avant d’avoir ôté les fils de sa suture d’ici  8 jours. 

Arthur court après Arnaud le long de la plage… qui est le plus rapide?

Tout le monde se régale sur l’eau :

Arnaud en Kite, et moi en planche

Loïc emmène Arthur faire un tour 

Loïc

Laetitia prend le relai d’Arnaud

Après 2 bonnes heures de nav, nous laissons les garçons sur l’eau et partons entre filles explorer Coco : 

 

Nous découvrons de très beaux oiseaux blancs, les fameuses goëlettes blanches de St-Brandon

(White stern en anglais, ou Gygis Alba) qui nichent dans les arbustes, essentiellement des veloutiers.C’est d’ailleurs la pleine période de nidification aussi somme-nous attentifs à ne pas déranger leurs nids et leurs oisillons. 

Impossible de se lasser de leur vol si particulier, vif, agile, mais aussi souvent stationnaire. 

Aux deux extrémités de l’île, des bancs de sable

et de l’autre côté,

nous découvrons des sternes grises, elles aussi en pleine couvaison de leurs oisillons. 

Le matin Loïc emmène nos amis pêcher et plonger pendant que je fais travailler les enfants : pas question de prendre trop de retard sur le programme si nous voulons prendre des vacances à Noël. 2/3h d’école par jour c’est peu, mais en s’y tenant 7j/7j, sans vacances ni week-end, c’est un rythme qui nous convient bien à tous, élèves et parents/professeurs : c’est rythmé, régulier, et cela nous laisse du temps pour partager de nombreuses activités en famille.

la pêche du jour

L’après-midi ressemble à celui de la veille :  déchargement sur la plage des planche, kitesurf, windsurf, rekisteurf, skim board…

les amateurs de glisse que nous sommes tous se régalent!

Il semble aussi que la qualité du sable soit au TOP pour les boules et les chateaux de sable

Ce soir

c’est cari de langouste! fameux!

Les journées se suivent et se ressemblent un peu…à la variante près que à J+3, personne n’ira chercher de langouste, nous en mangeons depuis 2 jours, il est temps de faire un break!

Nous avons un nouveau voisin : Dominic est arrivé la veille avec son fils et 2 amis, pour kitesurfer et, pêcher.

Ce matin, deux tortues nous régalent d’un ballet : sans doute une parade nuptiale, un accouplement, car elles se tournent autour de puis quelques minutes.

Arnaud, Loïc et Laeti partent faire un petit coup de traine dans le lagon 

Puis nous continuons à nous régaler des sports de glisse

Laetitia

Arnaud  lance quelques sauts . 

Arnaud et Laeti ont plaisir à naviguer côte à côte. 

Et nous aussi!

Loïc en kitesurf, et moi en planche

Loïc

Bénédicte

L’eau est glassy près de la plage, le vent parfaitement orienté, c’est un régal de glisse!

Arthur en skim

 Quelle journée! Quelle famille heureuse!

Tôt le lendemain matin, nous changeons de mouillage, pour aller au nord  de l’archipel à l’île Tortue.

Nous passons devant l’île Rafaël,

siège des garde-côte et base de pêcheurs de Raphaël Fishing. Nous nous serions bien arrêtés pour rendre visite aux « habitants », mais le mouillage est agité, et les fonds peu engageants, bourrés de corail.

Les garde-côtes nous contactent par VHF pour vérifier notre permis de séjour, bien en règle :Nous en avons fait la demande à Port-Louis au tout début de notre séjour mauricien. Il faut se rendre sur place, au bureau de l’OIDC :  Outer Island Developpment Company, faire une demande, s’acquitter des droits de passage (5 000 RS par personne, à payer cash). La réponse, positive, est arrivée 10 jours plus tard.

Il se dit que seules 200 autorisations par an sont données aux non-mauriciens. Pour les mauriciens, l’accès y est libre.

L’îlot Tortue! Nous y sommes : 2 aller-retour en annexe pour amener planches et gréements à terre.

Le spot est encore plus sauvage que Cocos : un seul petit ilot de sable, une végétation très rase, pas un seul arbre, et des milliers d’oiseaux.

L’îlot est au milieu d’un lagon, entouré de récifs,

prolongé par une autre virgule de sable

Le cadre est idyllique, nous sommes le seul bateau à l’horizon, et ne côtoyons plus que des sternes. Les enfants nous réclamaient un feu de camp depuis longtemps, je crois que nous avons le spot idéal!

Nous partons récolter du bois pour le feu de ce soir. Le menu est déjà en tête : brochette de poissons. Nous avons en effet ramené un « Tuna Macquerel » , sorte de bonite allongée; Sa chair n’est pas très prisée, mais j’ai des recettes de marinades qui conviennent bien :

  • marinade méditerranéenne : jus de citron + ail + huile d’olive + herbes de provence (idéalement thym et romarin frais)
  • marinade asiatique  : sauce soja + ail + gingembre+ huile d’olive
  • marinade sucré-salé : sauce soja + moutarde + miel + ail

J’avais mis au point ces marinades lors de nos période de faste pêche à Maurice au début du siècle. Car si nous pêchions beaucoup de poissons à chair fine (thon « yellow fin » , thon dent de chien, daurade coryphène), nous ramenions aussi pas mal de bonites et de carangues dont les chairs gagnent à être accommodées. Dans la pratique, pour les petits frigos des bateaux : préparer la marinade directement dans un sac congélation zippé, y mettre les filets de poissons coupés dans la longueur tels des aiguillettes de volaille, puis fermer le tout sous vide, et mettre au frais dans le bac à légumes. Quelques heures plus tard, ne reste qu’à les enfiler, sur la plage, sur des piques à brochette.

Là aussi les oiseaux couvent,

Si les sternes grises font des nids, les blanches se contentent de poser leur oeuf entre 2 branches. Les petits se cramponnent à la naissance.

Le paysage appelle à la méditation.

Et au kite surf!Le spot est parfait : le vent n’est pas arrêté par le banc de sable étroit de la plage, et la mer est lisse sous nos pieds

Victor et Laeti se relaient avec la planche

Victor

Laetitia

Arthur  a trouvé un super spot de skimboard

Il n’a pas peur des chutes!

Et c’est comme ca qu’on progresse!

Loïc et Arnaud partent faire le tour de l’îlot, et se retrouvent à naviguer dans une nuée d’oiseaux

Le vent baisse, et devient un peu léger pour les garçons Pendant qu’ils font la pause, c’est donc à notre tour, Laeti et moi d’aller sur l’eau!

Laetitia

Laetitia

Cela faisait 6 ans que je n’avais pas fait de kitesurf : idem pour Laetitia, qui reprend après quelques années d’interruption. La bonne nouvelle c’est que ca ne s’oublie pas, c’est comme le vélo!

Le plaisir de glisse est jubilatoire! Le cadre est grandiose, je mesure ma chance d’évoluer sur l’eau et dans les airs dans un tel environnement.

Give me 5! Pendent ce temps, les enfants préparent notre camp pour le soir : collecte du bois, décoration, installation de sièges,

sous les yeux des sternes qui rapportent à manger à leurs petits

Les petits attendent sagement….. Et d’autres parents couvent

En fin de journée, nous partons faire le tour l’île.

Tous ces plastique et ces déchets, c’est bien triste; c’est le sort de tous les îlots isolés que nous visitons.

à 18h, fin de journée, la bière est bien méritée après cet après-midi de glisse, le feu ronronne,les enfants sont comblés, 

et à 19h, les brochettes sont délicatement dorées

Le lendemain, Arnaud installe la gopro sur le casque, pour faire quelques films.

Loïc sort aussi son drone .

C’est de nouveau parti pour une journée de glisse. Nous sommes gâtés par la météo depuis quelques jours : du vent, et du soleil.

Première session du matin pour Arnaud et Laerti : croisement réussi!

Victor prend sa pause-récré entre 2 évaluations du CNED.

Pour changer du poisson, ce midi, ca sera salade d’ourites, et ce soir, cari de langouste! Je m’inspire pour cela du légendaire ragout de homard de l’île de Sein, dont le café «Chez Brigitte » garde jalousement la recette ancestrale. Ici, je le prépare à ma manière : des darnes de langoustes, pas trop cuites, mais surtout une merveilleuse sauce épicée, aux saveurs iodées de retour des Indes, teintée d’aromates européens, qui nappent des pommes de terres fondantes. Car au final, le meilleur dans le cari de langouste, c’est la sauce!

En fin de matinée, nous prenons la mer direction Coco où nous dormirons, avant de remonter le lendemain matin sur Chaloupe, distante de quelques milles seulement.

Pas question de rentrer de nuit à Chaloupe, de plus avec la houle actuelle.

Tôt le matin, nous rebroussons chemin, direction Chaloupe, célèbre pour la douceur de son sable. C’est un pur ilot de sable étincelant 

et d’une finesse telle qu’on s’y enfonce jusqu’à la cheville!
Nous n’aurions pas voulu manquer cette expérience.

 

Du sable, presque à perte de vue!

Difficile de courir en effet!

Sur ce sable blanc, le turquoise est grand gagnant.

On y trouve tout : un bloc de corail, mais aussi des déchets échoués, que les oiseaux utilisent pour fair leur nid, protéger leurs petits, sur un ilot exempt de végétation.

Un petit rafraîchissement s’impose. 1, 2, 3, GO!

PLOUF!Les enfants s’amusent de la texture du sable

Anna s’accommode toujours de son pansement étanche qui lui permet non pas de se baigner, mais au moins d’éviter le sable et les embruns qui entacheraient le processus de cicatrisation.

Est-ce un masque maori? De la calligraphie japonaise? ou un tigre stylisé?

devinette…

Tout simplement l’ombre du drone et des vaguelettes dans quelques centimètres d’eau.

La houle est toujours forte, et ne nous permet pas de dormir à Chaloupe. Dominic, qui a dormi là hier soir, fait le meme constat et quitte les lieux pour se mettre à l’abri plus au fond du lagon.

En sortant par la passe, Victor repère une magnifique vague, qu’il se verrait bien surfer.

Bye-byre Chaloupe!

Nous mettons cap sur l’île du Sud, que nous n’avons pas encore explorée.C’est là que 2 campements assez sommaires ont été construits il y a quelques années pour accueillir pêcheurs à la mouche, amoureux de la nature ou ornithologues.

A terre, nous croisons les 3 garde-côtes installés là pour 4 mois, quelques pêcheurs, et remontons cette allée incongrue : l’artère principale de l’île qui la coupe en 2.
Finalement, nous décidons d’appareiller le soir-même, après dîner, car nous avons 360NM à parcourir pour rallier la Réunion, notre prochaine étape.
Des calmes sont attendus dans les jours qui viennent, suivis de forts vents de Sud-est, ce qui  nous fait avancer notre départ de 24H.

une intrigante et grosse épave en plein lagon à l’île du Sud

Nous avons tous fait le plein de turquoise, de bruits d’oiseaux, de nature sauvage, de sensations de glisse, de sable nacré, de langouste, et d’isolement. La Réunion nous attire aussi beaucoup, il nous tarde d’aller randonner dans ses forêt tropicales d’altitude.

Cela nous prend à peine une petite heure de préparer Moby : ranger le matos de glisse de la semaine, remonter l’annexe, préparer les voiles, mettre un peu d’ordre à l’intérieur, fermer les capots, descendre la table du cockpit en tatami, préparer un repas rapide.

Ce sont les filles qui prennent le premier quart de nuit : quand on est 4 adultes, quel confort de se partager la nuit en 4 et non en 2!

A très vite pour la suite!

  1. Philippe Barouch says:

    Whaou vous nous faites toujours autant rêver !! Les photos ont l’Air d’avoir été prises juste pour illustrer le texte ou celui ci accompagne parfaitement les photos !! Bravo !
    Sinon, et je ne suis pas pêcheur mais j’ai lu dans le livre d’Olivier Besnier qu’Il tirait avec son fusil sous marin sur le poisson à bout portant pour éviter qu’il ne se décroche… mais vous avez sûrement lu son livre et déjà essayé…
    Bonne continuation de votre rêve marin !!

    • Bénédicte says:

      Oui, oui, nous avons lu son livre, mais jamais expérimenté sa technique, assez radicale et sans doute très efficace. Dans notre esprit, c’est bien aussi que le poisson ait sa chance!

  2. Laeti says:

    Sublime récit; tellement émouvant de relire et voir ces beaucnx moments partagés. Inoubliable. Merci les amis

  3. toutes les émotions de notre séjour en mai dernier émergent en te lissant. Nous espérons avoir la chance et le privilège de retourner à St Brandon. La nature y est intacte (ou presque), souhaitons avec force que le gouvernement mauricien comprenne l’importance de préserver cet archipel et de n’engager aucun développement.

  4. Jacques Pelletier says:

    cela fait vraiment envie… pour nous j’espere dans 4 ans le depart !!!
    bonne nav a vous tous. C’est un plaisir de vous suivre

  5. Carole says:

    Wouah, tu me donnes envie d’y retourner Béné. Avec un Outremer, je partirais au bout du monde!
    Les 50 nuances de bleus sont parfaites sur vos photos sublimes. Et les Zoizo la Vierge si joliment photographiés. Tes caris langouste me mettent l’eau à la bouche!
    Merci de partager ces instants uniques. Bon vent en Afrique du Sud!
    Nous serons au Brésil dans quelques semaines; ce serait magique de s’y croiser!! On vous embrasse

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