Suwarrow (ou Suvarov en français), nous a longtemps fait rêvé : c’est le petit ilot perdu choisi par Tom Neale pour y vivre heureux en naufragé volontaire, tel un Robinson moderne, pendant la dernière partie de sa vie.
C’est un privilège pour nous que de pouvoir toucher du doigt ce mythe de l’homme fuyant la civilisation pour y vivre seul, heureux, méditatif et proche de la nature.
L’atoll appartient aux îles Cook, petit état indépendant mais proche politiquement et géographiquement de la Nouvelle-Zélande et doté d’une quinzaine d’îlot habités : coralliens au nord, iles hautes au sud.
Suwarrow a un statut particulier : elle est inhabitée, et est devenue une réserve naturelle faisant partie du Parc National des iles Cook.
A ce titres, 2 rangers l’habitent 6 mois de l’année et accueillent (et surveillent) les navires de passages venus explorer ce petit bout de paradis préservé.
Elle bien sûr aussi très connue des navigateurs, que Tom Neale accueillait bien volontiers à Suwarrow. Solitaire, mais pas si sauvage! A lire absolument : le récit de son séjour à Suwarrow « Robinson des mers du Sud » .
A ce titre, Harry et son fils Pi, les 2 rangers qui étaient à poste cette année de mai à octobre inclus n’ont pas une vie très différente de notre naufragé : aucun bateau ravitailleur ne vient les ravitailler pendant ces 6 mois : ils sont déposés en début de saison par un petit cargo avec leur stock de nourriture, puis rembarqués… 6 mois plus tard. Dans l’intervalle, ils auront reçu la visite de 50 à 100 voiliers en transit (150 dans les meilleures années, 20 seulement l’année dernière à cause d’El Nino).
Nos amis australien du catamaran Tika (un Outremer 55) qui sont passés à Suwarrow il a un mois nous ont prévenu : les gardiens sont un peu tatillons, mais sympas. Ils font tout simplement leur travail = formalités d’immigration, quarantaine pour tous les produits frais à bord, respect de la réglementation du parc, mais ils sont aussi très accueillants, offrent une petite bibliothèque de livres à échanger, nous parlent des coins sympas de l’atoll à visiter, des animaux et espèces protégées de l’atoll : ils sont de très agréable compagnie.
Rien que par le mouillage, nous sommes enchantés : 3 ou 4 requins nous montrent leur nez à notre arrivée, et resteront en permanence autour du bateau.
Dès que nous sautons à l’eau, nous vérifions d’ailleurs qu’il n’y a pas un requin en-dessous…. et nous interdisons aux petits d’aller nager tout seul, on ne sait jamais….
La nuit, c’est pire, il y en a plus d’une dizaine à roder…
Les fonds sont cristallins,
l’eau très chaude
les oiseaux omniprésents
la lumière fascinante
…et les couchers de soleil splendides.
Dès notre arrivée, Harry et Pi, père et fils, nous proposent du troc : poisson contre vivre. Ils n’ont plus de sel (leur réserve a été souillée par un crabe de cocotiers qui a percé le sac) ni de riz. Nous les dépannons bien sûr, même si nos réserves sur Moby sont au plus bas, car nous arrivons bientôt en Nouvelle Zélande où toute notre nourriture sera confisquée pour cause de quarantaine.
Donc je leur donne mon dernier paquet de riz, ainsi que notre sel de table (il nous reste le gros sel, à mettre dans un moulin et quelques poignées de riz japonais). En échange, nous aurons du poisson frais tous les jours!
Nous descendons à terre, et à peine l’annexe est-elle amarrée que nos amis les requins viennent nous dire bonjour :
la petite plage est merveilleusement entretenue :
Un petit chemin traverse le motu dit « Anchorage » en passant par l’abri des rangers :
La maison des Rangers :
des vertèbres de baleine servent de tabouret!
au nord, la petite plage où Tom Neale venait se baigner,
et où à marée basse les requins nagent dans 50cm d’eau : nous reviendrons tous les après-midi avec les enfants regarder ce beau spectacle.
Nous partons explorer la partie Est du motu, à la découverte de la faune et de la flore locale.
Tristesse de découvrir une tortue mariné échouée et prisonnière de racines aériennes. Il est trop tard pour la sauver : les crabes de cocotier la dévorent déjà.
Curiosité : les enfants découvrent cette drôle de pierre…. qui flotte! Ils décident de la rapporter aux rangers qui pourraient l’utiliser comme pierre ponce.
Tristesse également de découvrir tous ces déchets abandonnés par la mer.
Le lendemain, nous continuerons nos découvertes naturalistes par la visite de la partie Ouest du motu, bordée d’un platier plein de vie.
Finalement, nous croisons de nombreux crabes de cocotiers, pas si farouches quand ils sont protégés comme ici.
Plus on avance, plus le platier devient sauvage et aride
Harry et Pi nous parlent d’un superbe spot de raies mantas : elles passent à priori à leur « station de nettayage » vers 7h du matin. Une première fois, nous laissons les enfants à bord prendre leur petit déjeuner et filons : la rencontre est magique, 4 raies mantas sont au rdv : elles viennent en effet se faire nettoyer la mâchoire et les mandibules par de petits poissons , qui rentrent jusque dans leur bouche pour enlever les restes de nourritures.
Loïc attend une manta au fond, la rencontre est très belle.
A mon tour d’en croiser une première, puis de me retrouver au milieu du ballet…
Le lendemain, nous y retournons avec les enfants, qui ont très hâte de nager de nouveau avec ces majestueux animaux inoffensifs. Nous avons en effet croisé souvent les mantas, aux Marquises et aux îles sous le Vent, mais jamais dans un tel environnement, d’eau cristalline et de coraux préservés.
Nous aurons aussi l’occasion de faire de beaux snorkelings dans une eau très chaude : un matin, nous resterons près d’une heure et demie dans une l’eau à plus de 30°! Nous rencontrons de gros animaux : raies pastenagues, requins pointes noires, gros mérous, carangues….
Mais aussi de très jolis petits poissons de lagon, d’originales formations coralliennes :
Il faut dire que les îles Cook enregistrent un pic historique de chaleur avec pas loin de 35° : notre nouvelle voile d’ombrage Odonata reçue à Bora-Bora prend tout son sens, et nous procure à la fois une belle zone d’ombre au vent sur le trampoline, et une excellente ventilation fraiche dans le carré.
Mais les escales, ce sont aussi les rencontres, avec nos rangers bien sûr, que nous passons voir à terre tous les jours, pour papoter, échanger des livres, des films, troquer un peu de nourriture. Je leur dépose une baguette fraichement sortie du four de Moby : Pi me raconte que Harrry, son papa est un ancien boulanger à Mahinitiki, qui ensuite s’est lancé dans l’élevage de la Perle : il a investi dans une ferme perlière il y a une vingtaine d’année, puis l’a revendue dernièrement : suite au réchauffement climatique, l’élevage de perle est devenu plus difficile et moins rentable : l’eau est trop chaude, il faut donc élever les naissons en profondeur, ce qui nécessite de les soigner sous l’eau en plongée bouteilles, là où une simple apnée suffisait.
Rencontre aussi avec Andiamo, innovant et inventif catamaran de plans Chris White, appartenant à Mickael et Debbie, un couple d’américains de Boston, très sympathiques. Original : il est gréé avec 2 mats ailes et focs bomés sur enrouleur qui lui permettent lui et sa femme, heureux jeunes retraités sexagénaires, de manoeuvrer seuls ce cata de 47 pied. Autre particularité : une porte donne accès du carré à un cockpit frontal, situé en arrière du mat, très agréable en navigation et au mouillage également. Nous prendrons plaisir à prendre l’apéro sur Andiamo et à échanger sur nos expériences de navigations et tranches de vie.
5 ème et dernier soir, nous nous organisons un petit apéro familial sur le trampoline, le coucher de soleil est exceptionnellement beau ce soir. Demain, le vent rentre, il sera temps de quitter Suwarrow, cap sur les Fijis où nous rejoignent Papily et Mamily : les enfants sont super heureux de retrouver leurs grands-parents!!!
Gilles says:
Voilà : la bouffée d’oxygène, de beauté et de tranquilité…
Laetitia says:
magique ce recit..merci de nous faire partager ces doux moments. Heureuse de vous avoir eu au tel. Bisous . Laeti
ASSANTE says:
Magnifique voilà où c’est réfugié la civilisation ! merci encore pour ces merveilleuses images, ça nous réchauffe, ici il commence à faire froid nous allons avoir besoin de vos soleils chauds!!
Ollivier BORDEAU says:
Aaah ! Voilà le reportage qu’il nous fallait cette semaine où nous avons rallumé le chauffage dans la maison au Fort Bloqué 🙂
Merci beaucoup et vivement les Fidgi !
Ollivier
Lorraine Gentlemann says:
Beautiful, we are also ordering canapee for our trip into South Pacific. All the best.