Bahamas -1- Les îles du Sud

Nous y voilà, aux Bahamas, dernière escale tropicale de notre tour du monde, et dont nous attendons beaucoup. Nous avons en effet rushé en remontant l’arc Antillais, afin de préserver au moins 6 semaines pour la découverte de l’archipel :  700 îles, dont seulement 20 sont habitées toute l’année. Les voiliers canadiens viennent y passer l’hiver en quête de soleil et de chaleur, un peu aussi les américains, mais très peu d’autres nationalités qui naviguent plutôt dans les Antilles. Cela nous intrigue un peu, et nous avons hâte de nous faire une idée sur ce bassin de navigation dont nous soupçonons qu’il soit largement méconnu des Européens.
 
A l’entrée dans les Bahamas, notre premier contact avec la civilisation sera le survol de Moby par l’hélicoptère des US Coast Guards Cela donne le ton : les Bahamas sont sous la coupe des USA, en ce qui concerne au moins la surveillance de leurs frontières!
Nous avons fait notre clearance tôt le matin à Mayaguana, et sommes repartis aussitôt vers Crooked Island où nous attendent mes parents, qui ont loué un Lagoon au départ de Marsh Harbour (Abacos), skippé par Sylvain.

Nous avons prévu une navigation en tandem de 2 semaines dans les iles du sud des Bahamas. En fin de journée, nous traversons un petit détroit entre les « Plana Cays » : ces îles ne sont guère plus que de longs bancs de roches et de sable plantés de tout petits palmiers. 
la variété : le Thatch Silver Palm, qui ressemble en miniature au Vacoa des Mascareignes. Endémique des Bahamas, il est  utilisé pour faire des toit de palme, comme son nom l’indique, mais aussi pour divers objets de vannerie, ceintures, paniers, objets de décoration….
Sur l’horizon, de très haut souffles montent dans les airs. Nous pensons tout d’abord à des baleines, mais ce sont en fait des rochers « souffleurs ».  
Nous visons une arrivée de nuit à Landrail Point, au Nord-Ouest de Crooked Island, l’île principale des Atcklins. Un phare yest censé baliser l’entrée, mais il n’est pas en opération…
Mais la baie offre une entrée franche, et nos cartes Transas (i-sailor) sont comme toujours très précises, nous donnant une large zone de fond sablonneux dans 5m d’eau…juste à côté du bateau de mes parents.

 

Au réveil, nous découvrons des fonds d’une clarté incroyable, et d’une couleur turquoise à nulle autre pareille.

Il fait chaud, très chaud : nous installons la voile d’ombrage les enfants s’y installent … pour travailler! Je vous assure, Victor bosse son français, et Anna fait de la lecture.

Loïc lance le drone, et nous découvrons l’île de Crooked vue d’en haut,

la mouillage de Landrail

C’est vraiment magique de pouvoir visiter l’arrière pays par les airs!

le mouillage de Landrail, et le phare de Bird Rock au loin

Pour fêter nos retrouvailles familiales, nous allons tous au resto! Les enfants se sont mis sur leur 31 pour les retrouvailles avec leurs grands-parents.
Nous accostons dans un petit port creusé dans la roche. 
A Landrail, nous découvrons une petite communauté Bahaméenne fort restreinte : une épicerie, un resto, un poste de police…
En marchant vers le restaurant, nous découvrons le « village ».
L’île a été ravagée par le cyclone Joaquim, en octobre 2015, qui a inondé 75% des habitations, détruit la centrale électrique, et ravagé une cinquantaine de maisons… Aujourd’hui, il reste moins de 200 habitants, répartis dans plusieurs petits « settlements »;  les autres ont fui pour trouver travail et habitation ailleurs.
La reconstruction est longue, très longue, et les dégâts encore très nombreux :
L’ancienne station service est inutilisable : dommage car elle était pratique aussi pour les bateaux.Il y a un projet de reconstruction à quelques mètres de là, mais à l’arrêt.

la dalle de la future station service 

Les maisons qui sont encore habitées sont par contre particulièrement pimpantes. 
Au resto, nous nous régalons et découvrons les spécialités locales : langouste rôtie, thazard en légère friture,  l’incontournable « mac’n’cheese » (gratin de macaroni, prononcer « maquenne-tchise »), poulet mariné, riz aux haricots, salade de haricots verts : tout est frais, délicieux, fait-maison et local!
En marchant sur la route, nous sommes survolés par un tout petit avion : il nous faudra aller visiter la piste qui se trouve non loin du village; 
 
En fin d’après-midi, Loïc part avec Victor et Arthur plonger en apnée sur le tombant, qui descend de 5 à 200m en quelques mètres seulement. 
Là, ils se font surprendre par un requin particulièrement agressif qui les charge à 3 reprises, visiblement mécontent de voir des humains sur son terrain de chasse. Heureusement, il n’a pas idée de les croquer, seulement de les intimider : sans doute les prend-il pour des prédateurs concurrents, ce qui fâche, non? Tous 3 se replient avec calme et rapidité, palmant à reculons vers l’annexe, en restant groupés serrés. Ils se souviendront longtemps de cette charge inopinée.Des émotions pareilles, ca soude une famille!

En toute fin de journée, nous allons explorer la plage, très sauvage. Tout le long, nous observons des maisons, dont presque toutes sont détruites et à l’abandon. 
Au nord de l’île, sur un ilot, le phare de Bird Rock est impressionnant de stature, il date de 1876. 

Tout au bout de la plage, la piste d’aviation! Fréquentée par des pilotes-propriétaires américains et canadiens, qui viennent pour la pêche, en particulier la très confidentielle et très select pêche au « Bone fish » sur les « flats », ces grandes étendues d’eau sablonneuses et peu profondes dont Crooked Island regorge. C’est une pêche à la mouche sportive de « catch and release » (le bone fish n’est pas réputé pour la finesse de sa chair, il est très difficile à préparer), très populaire chez les américains du sud.

Deux pêcheurs à la mouche en route vers les Flats, dans leur tenue typique « camouflage des sables »

Un jeune homme vient nous accueillir et nous propose de faire avec lui le tour du propriétaire. L’occasion pour nous de nous familiariser avec l’accent Bahaméen qui est très particulier. Les installations aéroportuaires sont sommaires :

 un beach bar, particulièrement bien placé,quelques quelques bungalows dotés de chambres, une salle de restaurant et c’est tout!
Plus loin, un projet de marina a été abandonné : la maison du propriétaire, un américain, a été détruite,et la reconstruction n’a pas encore eu lieu…. quand à parler de développement, ce n’est surement pas pour tout de suite. L’île de Crooked est très basse sur l’eau, et particulièrement vulnérable aux cyclones : la montée des eaux barométrique y fait des dégâts impressionnants.
En longeant la plage au retour, nous passons devant la ruine de cette jolie maison.
L’arbre à coté, qui ressemble fort à un filaos n’est pas en meilleur état…
Anna et moi ramassons des gorgones, qui jonchent la plage par centaines : vertes, roses, violettes, jaunes, marron….
Une fin de journée paisible à profiter de la plage, de la nature

et du soleil qui se couche. 
 
Nous appareillons pour French Wells, un mouillage tout au sud de Crooked.Nous passons sur un banc de sable peu profond. Les garçons surveillent le fond. Difficile d’évaluer à vue d’oeil la profondeur tant l’eau est claire!
Nous sommes tous sous le charme de ce « turquoise » si particulier des Bahamas. Je mitraille, et me donne comme objectif de « capturer » les 50 nuances de turquoise. 
Le Lagoon 42 loué par mes parents a un peu plus de tirant d’eau que nous, nous lui avons ouvert la route 
 
Ils sont très contents de leur bateau,qui bien que petit, est remarquablement habitable, en particulier la cabine propriétaire,

et dispose d’espaces à vivre particulièrement réussis. En terme de performance, ca n’est évidement pas une bombe… mais il a de bons moteurs! ll faut bien ça pour pouvoir suivre Moby, véloce dans le petit temps….
Nous mouillons dans des eaux cristallines.
La plage est très belle et le sable d’une douceur….
Le site est très sauvage, inhabité, les eaux turquoises,Petite curiosité : un vieux puit, toujours praticable! De l’eau douce donc, venant de nappes phréatiques. Ces puits sont très courants aux Bahamas, pratiques pour le ravitaillement des bateaux, ils étaient dans l’ancien temps des étapes incontournables. J’apporte ma bassine et en profite pour faire des lessives de serviettes!
Et derrière la plage,

 la mangrove s’avère accessible en annexe via un canal naturel.Nous partons pour une belle ballade naturaliste

au coeur de la mangrove,
 
L’eau est peu profonde, mais d’une clareté….
Nous dérangeons un petit requin nourrice venu trouver refuge dans les méandres. 
Le coucher de soleil est hypnotisant, la plage magnifique, il n’y a pas de vent : c’est le site idéal pour faire un feu!
Papily et les enfants ont préparé les branchages avec l’aide précieuse de SylvainNous prenons l’apéro sur la plage. Les enfants nous ont aussi fabriqué une table en pierre et Sylvain des sièges en vieux cordage de marine
Les enfants sont tellement heureux de pouvoir partager avec leurs grands parents cette vie de plein air qui leur plait tant. Le lendemain, nous partons un peu plus au sud pour Long Cay. 
Au petit déjeuner, nous faisons des crêpes! Je n’ai pas emporté mon Bilig (nom breton de la crêpière traditionnelle en fonte électrique), il est resté à la maison…  mais une simple poêle à crêpe anti-adhésive dépanne. Nous faisons aussi des crêpes blé noir, le repas préféré des enfants, quand nous trouvons du sarrasin, que j’ai bizarrement eu un mal fou à trouver aux Antilles françaises, alors qu’en Polynésie et à la Réunion, sans problème!

Côté pêche, ca n’est pas un succès : dès que nous attrapons un poisson, il sert d’appât aux requins, qui le croquent d’un coup de dent…

ce qu’il reste de sa bécune dans les mains de Sylvain…

Loïc lance le drone, et cette fois, c’est Anna qui pilote! Très concentrée… 
Nous voulons prendre de belles photos de Moby, car c’est décidé, nous le mettons en vente. Sans regret, car il nous aura permis de réaliser notre rêve : un tour du monde à la voile en famille. Mais d’ici quelques mois, nous reprendrons nos vies de terriens, le travail, l’école, le jardin, et n’aurons pas usage d’un bateau de grand voyage. Nous espérons que Moby aura un nouveau propriétaire qui continue à naviguer longtemps…
Nous continuerons bien sur à naviguer sur les bateaux de la famille, les enfants à faire de la voile légère, et nous aurons peut-être un day-boat pour profiter des beaux jours en famille?
Mais le virus du voyage nous a piqué, et nous repartirons un jour en bateau, pour continuer à explorer à la voile cette planète qui est si belle, à la découverte de ses habitants, nos frères humains : « Tous pareils, tous différents! »
 
 

A Long Cay, nous sommes mouillés tout proches du village d’Albert Town.

Vers le Sud de Long cay

vers le Nord de Long Cay

Là encore, c’est une longue plage de sable blanc, de l’eau turquoise, mais on ne s’en lasse pas….

Albert Town a été un des plus gros villages des Bahamas du temps de la marine à la voile, jusqu’au milieu du 19ème siècle  avec près de 2000 habitants : c’était en effet un port d’entrée aux Bahamas, stop idéal pour les voiliers, le port disposant d’un accès aisé à la voile, d’une rade abritée sous le vent de l’île et d’une bonne profondeur.
Du jour au lendemain, avec l’avènement de la marine à vapeur, le village est devenu fantomatique, puis carrément désert avec aujourd’hui seulement… 12 habitants.
 
Albert, c’est aussi le nom de mon papa : il FAUT aller à terre y faire un tour.
Nous débarquons sur la plage, le quai est impraticable. 
Nous croisons nombre de ruines, de maison abandonnées, les ruelles sont désertes…
Une habitante qui était sur le pas de sa porte nous aperçoit, et nous salue. Les visiteurs sont rares, et elle nous fait les honneurs de l’église : détruite par un cyclone…. Curiosité : elle n’a été reconstruite que partiellement :

 seul un des bas-côtés a été rebâti
Nous nous enquerrons du prêtre : il ne vient que très rarement officier.

Un autre habitant vient à notre rencontre. Justin veut que nous immortalisions la rencontre,en particulier avec Albert, en visite à Albert Town!

Justin et Albert

Il nous offre des vestiges du temps passé : d’anciennes bouteilles en verre.

En rentrant au bateau en annexe, nous longeons encore quelques maisonnettes en ruines : quelle tristesse de savoir que tous ces habitants ne reviendront plus. C’est une des tristes réalités des îles extérieures des Bahamas : quand elles sont touchées par un cyclone, de très nombreux habitants décident de ne pas reconstruire, et d’aller plutôt tenter leur chance ailleurs, dans le nord, sur des îles plus touristiques et densément peuplées. Ainsi, les « Outer Islands » se dépeuplent inexorablement au gré des cyclones.
Le soleil se couche sur Albert Town….
Nous quittons le groupe des Atcklins pour rejoindre Long Island, via le Crooked Passage. Nous atterrissons à Little Harbour, un curieux petit port naturel de la côte au vent : une échancrure rectangulaire parfaite dans les terres, fermée par deux petites îles, et ouverte sur une passe. Nous n’avons que l’embarras du choix côté plages, et nous décidons pour le tout petit banc de sable qui borde l’îlot fermant la baie. Ce sera notre plage « privée » pour la journée. Skimboard, snorkeling,

chateaux de sable…..
Quand nous appareillons le lendemain, nous apercevons drossé à la côte une ancienne épave, de ce qui a dû être un très grand bateau.
Nous faisons escale à Clarence Town, qui sur la carte ressemble à un gros village et où nous espérons faire un avitaillement de produits frais. Papily et Mamily partent à terre avec leurs sacs…. et ne reviennent à la nuit que plusieurs heures plus tard. Nous commencions à être inquiets. N’ayant pas trouvé ce qu’ils voulaient dans la boutique du village, la patronne leur propose de faire le « taxi » pour eux jusqu’au supermarché le plus proche….. Tope-là! Sauf que le commerce se trouve en réalité à une petite demi-heure de distance en pick-up sur une route défoncée….Le dos de Papily se souvient encore des cahots de la route et de la conduite sportive de sa conductrice… Ils reviennent 2 heure trente plus tard chargés de victuailles, produits frais et savoureux, encore sous le charme de l’hospitalité et de la gentillesse des Bahaméens.
Pendant ce temps-là, nous sommes à la plage avec les enfants
 ballade en amoureux, skimboard, chateaux de sable…

Nous retrouvons nos amis de Luna Bay II, Un Outremer 45 avec 3 enfants à bord : Théotime, Charline et Léonie ont à peu de chose près le même âge que Victor, Arthur et Anna. Nous les avons croisés plusieurs fois, et avons enfin le temps de bien sympathiser autour d’un apéro : les parents dans le cockpit autour d’un ti-punch, et les enfants sur le trampoline à faire les fous!
Au petit dèj du lendemain, un bon pain de mie grillé, fait maison dans notre machine à pain. Nous en sommes très contents, depuis qu’ Alexandre nous l’a offerte à l’île Maurice. Nous y faisons du pain, du pain de mie, des brioches, mais aussi des cakes au chocolat, au yaourt, aux pommes, des financiers…. et même du gateau breton!
Cette fois-ci, c’est Arthur qui pilote le drone : décollage, vol, et atterrissage. Il n’a pas voulu faire de photos, seulement un film!
Nous sommes à Rum Cay, dans la baie de Flamingo, une superbe plage, et encore une fois, nous ne sommes que 2 bateaux au mouillage; Après avoir exploré presque toute la baie à la recherche d’un bon mouillage, nous revenons mouiller près de la passe : c’est le seul endroit sans patate de corail. Le snorkeling en revanche est très prometteur, avec tout ce corail. 
Là encore, sable blanc fin comme de la farine, des kilomètres de plage où nous prenons l’habitude de nous balader en fin de journée, du skim pour les garçons,

on ne s’en lasse pas.
Nous partons faire un snorkeling dans le nord du récif,près d’une épave.

Les coraux  Elkorn sont majestueux.
Nous croisons quelques gros spécimens, de mérou, de requin nourrice aussi…mais l’animal est craintif, et nous tourne le dos.
Puis nous retournons le lendemain à Long Island, tout au nord, dans la jolie baie de Stella Maris. Nous nous arrêtons en mouillage de jour dans une petite baie adjacente, très sauvage. Nous déposons Papily et Mamily sur leur petite plage personnelle. C’est merveilleux de profiter de ces plages calmes et peu fréquentées. Encore du bleu turquoise intense, du sable blanc à faire mal aux yeux, et de petites grottes.
Nous irons en fin d’après-midi explorer Galliot Cay, et en particulier le petit village de Seymours, à travers un méandre de mangrove,
que l’on parcourt en annexe, le long de grottes, jusqu’à un petit pont  doté d’un ponton
En fait de village, il ne s’agit que d’un « settlement » comme on appelle ici ces regroupements de maison. Pas vraiment de commerces : un barbier, une location de « cottages », et c’est tout. Une vieille dame sort de sa maison pour nous saluer, et papoter. Ancienne postière à Nassau, elle est revenue passer sa retraite dans la maison familiale, et améliore ses fins de mois en tressant des feuilles de palme pour en faire des paniers, des ceintures, typiques de l’artisanat Bahaméen.
Demain, nous quittons les Bahamas du Sud pour entrer dans les Exumas, chapelet d’îles et d’îlot magnifiques, où la navigation se fera par sauts de puces, et où nous attendent de magnifiques snorkeling, des centaines de petites plages, des épaves d’avions et de bateaux, des grottes sous-marines, des cavernes semi-immergées, des iguanes, des cochons nageurs….à suivre….
  1. jeanfrançois says:

    magnifique découverte, le véritable carribean blue.
    merci encore !
    bonne fin de voyage.

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